Vous retrouverez plus bas la lettre ouverte téléchargeable en format PDF. Le format ouvert de cette lettre permettra d'assurer une parfaite transparence sur nos actions pour les nombreuses entreprises de la filière plasturgie et composites qui ne sont pas toutes au fait des négociations qui les concernent directement.
Contenu de la lettre:
Monsieur Benoît HENNAUT
Président
Fédération de la plasturgie et des composites
Le Mans le 01er juillet 2020
Objet : Un dialogue social plasturgie déconnecté de la réalité de nos entreprises
Monsieur Le Président,
Cher Collègue,
La situation grave à laquelle de nombreuses entreprises de la plasturgie et des composites risquent de se retrouver confrontées m’oblige à vous écrire cette lettre ouverte.
Vous connaissez autant que nous la crise qui frappe notre pays et qui impactera de manière durable les entreprises de la filière dont nos deux Organisations sont aujourd’hui les représentantes officielles.
Vous connaissez autant que nous l’acharnement déraisonnable et non raisonnée des adversaires du plastique et les effets négatifs tant pour les entreprises que leurs salariés du « plastic bashing » ambiant.
Malgré cela, quelles ont été les principales négociations de branche pendant la crise du covid-19 ?
Renouvellement d’une contribution (nous disons taxe) conventionnelle « pour la formation » de 0,15% de la masse salariale, augmentation à terme de 2,2% des salaires minimas et nouvel accord sur les indemnités de licenciement et de retraite : Voici les négociations menées ces derniers mois sous l’impulsion, soutien et/ou demande de votre Organisation avec bien entendu le soutien des Syndicats de salariés.
A Plastalliance, ce n’est pas le Président, le Bureau, le CA, une « commission ressources humaines » ou le secrétaire général qui décide de signer ou non des accords de branche. Ce sont nos entreprises que nous consultons quasiment en temps réel au fur et à mesure des négociations qui sont menées.
Nous sommes fiers de penser que nous sommes aujourd’hui apparemment les seuls à le faire au moins dans notre branche mais nous en sommes aussi désolés que notre pratique démocratique ne soit pas une évidence ailleurs car les actions des uns ont des conséquences économiques pour les autres.
A la question de savoir si nos entreprises adhérentes étaient en accord pour la reconduction pour 3 années supplémentaires d’une contribution de 0,15%, nos entreprises, de toutes tailles et de tout secteur ont répondu non. Cette contribution conventionnelle est certainement bénéfique pour certains organismes de formation mais elle est vue comme une taxe supplémentaire pour nos entreprises. Une grande majorité des branches industrielles n’ont pas ce type de taxe dont on ne sait toujours pas encore aujourd’hui (malgré des demandes réitérées de Plastalliance) à combien d’entreprises de la plasturgie elle a bénéficié. On connait en revanche le coût de la collecte qui représente près d’1/5ème des montants collectés.
A la question de savoir si nos entreprises seraient d’accord d’augmenter à terme les salaires minimas de 2,2%, nos adhérents ont répondu non à l’unanimité des répondants. Nous sommes en pleine crise, est-ce le moment de se mettre à la place des entreprises pour décider, même partiellement, de leur politique salariale ?
L’accord salaires du 28 mai 2020 est vu très négativement par nos industriels, tant par le montant de l’augmentation prévue qui ne prend en compte ni la crise, ni les avantages sociaux propres à chaque entreprise (comme le 13ème mois, tickets restaurants, mutuelle 100% pris en charge par l’entreprise par ex) et tant paradoxalement par la tache sur l’attractivité de la banche avec un 1er coefficient en dessous de la valeur du SMIC au 1er janvier 2020. Plastalliance ne pouvait signer un tel accord.
Comme si cela ne suffisait pas, une nouvelle négociation sur les indemnités de licenciement et de retraite a été ouverte et elle devrait selon toute vraisemblance se conclure par un accord tout prochainement.
Ce nouvel accord que votre Fédération soutient ainsi que les OSS vient à la suite de l’accord sur le même thème (indemnité de licenciement et de retraite) conclu toujours par votre Organisation et deux OSS le 25 octobre 2018.
A l‘époque, Plastalliance avait alerté, avant, pendant et après la négociation sur les conséquences financières graves de ce dernier accord pour les entreprises. Le calcul était en effet très simple à faire.
Votre Fédération a décidé de son côté de signer cet accord. A peine quelques mois plus tard, il était annoncé par courrier en date du 06 février 2019 co-signé par vous-même et par votre toujours actuel Vice-Président RH de la Fédération que vous souhaitiez retirer la signature de votre Organisation et ne pas en conséquence déposer le dit accord.
Ce refus du dépôt de l’accord est motivé selon la lettre « à la lumière d’investigations comptables complémentaires menées par les experts de la Fédération après la signature de l’accord du 25 octobre
».
Toujours selon ce courrier, « Ces travaux révèlent qu’un déplafonnement et une majoration des indemnités de retraite entraîneraient des augmentations de provisions financières pour les entreprises de la branche plasturgique. Il est de la responsabilité de la Fédération de ne pas négliger ces chiffres et ces conséquences pour les entreprises et leurs salariés et nous ne pouvons pas laisser cet accord produire ses effets
».
Votre Fédération a in fine dénoncé l’accord en question au cours du mois d’avril 2019.
Depuis la signature et dépôt (par la FCE CFDT) de l’accord du 25 octobre 2018, les entreprises non-membres de la Fédération de la plasturgie et des composites soit près des 3/4 des entreprises sont revenues au Code du Travail. Vos entreprises quant à elles sont soumises aux dispositions de l’accord du 25 octobre 2018 pendant 15 mois après cette dénonciation.
Ce délai va bientôt se terminer et vos propres entreprises devraient apparemment selon des OSS pouvoir bénéficier des dispositions du Code du Travail concernant toutes les indemnités de rupture.
Le nouvel accord qui est en projet est un accord qui non seulement coûtera bien entendu beaucoup plus cher pour les entreprises que le Code du Travail mais son coût sera in fine plus important par rapport à l’accord du 25 octobre 2018 que votre Fédération considérait comme ayant des conséquences négatives pour les entreprises.
L’accord du 25 octobre 2018 ouvrait l’indemnité de départ à la retraite des non-cadres aux salariés ayant 5 ans d’ancienneté (le Code du Travail exige 10 ans). Le futur accord prévoit juridiquement une ancienneté de 8 mois minimum….
Les salariés non-cadres ayant entre 8 mois et moins de 5 ans d’ancienneté auront ainsi droit à une indemnité de départ à la retraite ce qui n’a jamais été le cas en plasturgie. Le chiffrage par vos experts a-t-il été fait sur l’ensemble de la branche ? Si les montants concernés peuvent ne pas paraître importants par salarié, le coût global et l’effet de masse est absolument loin d’être négligeable.
Selon l’accord du 25/10/2018 que vous avez dénoncé, un salarié ayant 25 ans d’ancienneté bénéficie de 3 mois de salaires en indemnité de départ à la retraite (1 mois et ½ selon le Code du Travail). Le futur accord octroiera une indemnité de 3,75 mois.
Selon l’accord du 25/10/2018 que vous avez dénoncé, un salarié ayant 30 ans d’ancienneté bénéficie de 3,85 mois de salaires en indemnité de départ à la retraite (2 mois selon le Code du Travail). Le futur accord octroiera une indemnité de 4,58 mois.
Si certes le plafonnement (à 30 ans d’ancienneté) a été introduit dans le projet du futur accord, il est indéniable que le coût des départs à la retraite est augmenté (voir créé comme vu ci-avant) de manière non négligeable et évolue de façon beaucoup plus rapide pour les entreprises dont des salariés non-cadres partiraient à la retraite au bout de 30 ans d’ancienneté maximum soit la très grande majorité des salariés.
Ce ne sont malheureusement pas les seuls exemples du surcoûts importants et inadmissibles qui seront engendrés par le futur accord sur les indemnités de licenciement et de retraite qui par ailleurs, n’est soumis à aucune contrepartie pour les entreprises de la part des OSS.
Nous avons soumis à référendum ledit projet depuis le 26 juin 2020. Les nombreux retours sont à ce jour unanimement négatifs.
Ce dialogue social national en plasturgie ne fait que nous conforter dans la position historique de Plastalliance depuis près de 10 ans quant à la nécessité de soutenir la décentralisation de la négociation en entreprise, c’est-à-dire là où tout se passe dans la vraie vie.
Vous comprendrez également que Plastalliance se doit de prendre ses responsabilités afin de protéger les intérêts des entreprises de la filière, adhérentes ou non. Nous mettrons en conséquence tout en œuvre pour que tout accord ayant des conséquences dommageables selon nous pour les entreprises de la branche plasturgie ne soit pas étendu et ce, au vu des répercussions tant économiques que sociales pour ces entreprises.
Je vous prie, Monsieur Le Président, Cher Collègue, de recevoir l’assurance de mes sentiments les plus confraternels.
Christophe Clergé
Président
Plastalliance