Précisons tout d'abord que l'utilisation d'un masque en tissu réutilisable est bien plus préférable que l'absence de masque pour limiter la propagation du covid-19 dès lors que les conditions d'utilisation de ce type de masque sont respectées (port, lavage, limite de réutilisation...).
Cependant, dès lors que les entreprises de la plasturgie et des composites peuvent ou pourront avoir accès à des masques à usage unique chirurgicaux et/ou FFP2-N95-KN95 (qui sont pour ces derniers les mêmes types de masques avec respectivement les appellations européennes, américaines et chinoises), les entreprises devront selon nous privilégier ce type de masque pour leurs salariés par rapport aux masques dits "grands publics" réutilisables-lavables et ce, afin de travailler dans des conditions de sécurité optimales.
Les raisons qui nous amènent à prendre cette position sont les suivantes:
1) Les résultats d'un essai randomisé daté de 2015 sur l' "efficacité" des masques en tissu par rapport aux masques médicaux chez les travailleurs de la santé
Le but de cette étude était de comparer l'efficacité des masques en tissu aux masques médicaux chez les professionnels de santé hospitaliers. Nous sommes dans le cas d'une population à haut risque.
La mesure principale des résultats portait sur les maladies respiratoires cliniques (IRC), le syndrome pseudo-grippal (SG) et l'infection virale respiratoire. Bien entendu le covid-19 n'était pas concerné.
Les résultats sont les suivants (traduction):
"Les taux de tous les résultats de l'infection étaient les plus élevés dans le bras du masque en tissu, avec le taux de SG statistiquement significativement plus élevé dans le bras du masque en tissu (risque relatif (RR) = 13,00, IC à 95% 1,69 à 100,07) par rapport au bras du masque médical . Les masques en tissu avaient également des taux d'ILI significativement plus élevés par rapport au bras de contrôle. Une analyse par utilisation du masque a montré que les SG (RR = 6,64, IC à 95% 1,45 à 28,65) et les virus confirmés en laboratoire (RR = 1,72, IC à 95% 1,01 à 2,94) étaient significativement plus élevés dans le groupe des masques en tissu que dans le groupe des masques médicaux. . La pénétration des masques en tissu par des particules était de près de 97% et les masques médicaux de 44%."
Les conclusions de l'essai sont les suivantes (traduction):
"Cette étude est le premier ECR de masques en tissu et les résultats mettent en garde contre l'utilisation de masques en tissu. Il s'agit d'une découverte importante pour informer sur la santé et la sécurité au travail. La rétention d'humidité, la réutilisation des masques en tissu et une mauvaise filtration peuvent entraîner un risque accru d'infection. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour éclairer l'utilisation généralisée des masques en tissu dans le monde. Cependant, par mesure de précaution, les masques en tissu ne devraient pas être recommandés pour les TS, en particulier dans les situations à haut risque, et les directives doivent être mises à jour."
Vous trouverez l'étude ci-après:
2) La position de l'INRS sur les masques en tissus
L'INRS
indique concernant les masques en tissus: "Ces masques n’ont pas été soumis à l'ensemble des tests d’efficacité prescrits par les normes en vigueur. Le peu d’études scientifiques sur les performances de filtration des masques en tissu montrent une efficacité de filtration inférieure à celle des masques chirurgicaux. Une étude chez le personnel hospitalier a également montré que le risque d’infection respiratoire était plus important dans le groupe portant un masque en tissu que dans le groupe portant un masque chirurgical."
"Ils n’ont pas les performances des masques chirurgicaux et des FFP2. Les entreprises, après mise en œuvre des mesures de protection collective et organisationnelle permettant d’assurer la santé et la sécurité de leurs salariés, devront évaluer si la mise à disposition de masques alternatifs est adaptée aux risques résiduels encourus aux postes de travail."
"En milieu de soins, le dernier avis de la SF2H (date du 14 mars) recommande « de ne pas utiliser d’autres types d’écrans à la place des masques chirurgicaux (ex. masques en tissu, masques en papier, chiffons noués derrière la tête), du fait de données scientifiques concernant leur efficacité (étanchéité) très rares ». Ces recommandations sont basées sur les connaissances actuellement disponibles et sont susceptibles d’être modifiées en fonction de l’évolution des connaissances scientifiques et de l’évolution de l’épidémie actuelle COVID-19."
2) Difficulté grande de ne pas respecter le protocole de nettoyage et les limites de réutilisation et/ou de lavage des masques en tissus
Dans le cas d'un masque à usage unique, celui-ci est jeté après utilisation. La question de la décontamination ou du nettoyage ne se pose jamais.
En revanche, pour un masque réutilisable, il y a un protocole de décontamination à suivre.
Selon l'
AFNOR, "
Le cycle complet de lavage (mouillage, lavage, rinçage) doit être de 30 minutes minimum (blanchisserie ou autres) avec une température de lavage de 60°C et des produits professionnels."
L'AFNOR indique également:
"Il convient d’éviter tout contact entre un masque barrière souillé (à laver) et des articles vestimentaires propres. La personne chargée du lavage devra se protéger pour manipuler les masques souillés s’ils ne sont pas dans un sac hydrosoluble.
Il est recommandé avant tout lavage des masques barrières de nettoyer son lave-linge, en procédant à un rinçage à froid avec de la javel ou de le faire tourner à vide à 60°C ou 95°C sans essorage."
"Il est recommandé un séchage complet du masque barrière dans un délai inférieur à deux heures après la sortie de lavage. Les masques barrières ne doivent pas sécher à l’air libre. En blanchisserie industrielle, il convient d’utiliser les séchoirs et sécheuses. Pour le séchage domestique, il convient d’utiliser un séchoir et de nettoyer les filtres du sèche-linge (et se laver les mains après). Dans tous les cas, les masques barrières doivent être séchés complètement (c’est-à-dire toutes les couches à cœur), voire sur-séchés."
Quelle entreprise peut garantir que leurs salariés vont respecter ce protocole? Qui (entreprise ou salarié) pourra raisonnablement garder la "comptabilité" du nombre de lavages effectués en sachant que les masques réutilisables peuvent être lavés 10, 20, 30 ou 50 fois selon le type de masque?
Par ailleurs tout comme les masques jetables, il faut prévoir à minima 2 à 4 masques par jour (à chaque fois que le masque sera enlevé, pour boire, manger, fumer par exemple, il doit être changé). Si certes le caractère réutilisable permet de diminuer le coût d'utilisation par rapport à un masque à usage unique (en terme de coût/pièce), il est nécessaire de prendre en compte également les coûts du nettoyage (lessives, électricité, eau).
Enfin, il n'y a aucune garantie à 100% que la filtration d'un masque en tissu reste autant efficace entre le 1er et le dernier lavage (des fibres ou microfibres textiles notamment synthétiques peuvent se détacher pendant le lavage) . Les masques à usage unique chirurgicaux et FFP2 répondent à des normes et sont certifiés au sens juridique de ce terme contrairement à leur homologue réutilisable.
Plastalliance préconise en conséquence le port de masques à usage unique pour les entreprises de la plasturgie et des composites. En l'absence de ce type de masque à disposition, le masque réutilisable sera un dernier recours.
Pour rappel Plastalliance a lancé dès le 24 mars 2020 une opération "
Plan Marshall pour la plasturgie" pour approvisionner les entreprises adhérentes en masques chirurgicaux et/ou FFP2. Les retours des nombreux adhérents livrés sont extrêmement positifs quant à la qualité des masques et des prix très attractifs que nous avons négocié. Cette opération est à but 100% non lucratif pour Plastalliance qui ne perçoit aucune rémunération ou commission sur les masques livrés.
Nous invitons les (très rares) entreprises adhérentes qui n'ont pas encore passé leur commande de masque à usage unique à le faire ou à le prévoir car le port du masque va rester dans les habitudes sanitaires pour un très long moment.